LIBERATOR’S RUN WAR HORSE

Par Pierre-François Boselli

Alignement de Harley à Sainte Marie du Mont

A l’occasion des commémorations du 75ème anniversaire du Débarquement, Gérard Lameloise, bien connu dans le milieu de la Harley militaire, a souhaité rendre hommage aux combattants en deux-roues américaines. Il y a 5 ans déjà, il avait rassemblé 70 motos militaires à Carentan pour les commémorations d’alors. Cette année, l’objectif est quasi doublé. Les collectionneurs ont répondu présent à l’appel, et ce ne sont pas moins de 121 Harley militaires WLA ou WLC qui ont été inscrites.

Dimanche 2 juin, 9 heures du matin, les premières motos arrivent sur la place du village de Saint Mère Eglise. Ce village, parmi les premiers libérés le 6 juin 1944 est emblématique. Il est connu pour l’anecdote du parachutiste, John Steele, de la 82e Division Aéroporté américaine (82e Airborne), qui resta accroché au clocher de l’église pendant la durée des combats. Afin de rappeler cette histoire, un mannequin est toujours présent à cet endroit et c’est à l’ombre de son parachute que les Harley ont pris place.

Clocher de Sainte Mère Eglise

 

Après un briefing sur le parcours, les règles de sécurité et l’organisation de la journée, le convoi s’est ébranlé. La première étape consiste à rejoindre le front de mer à Ranevoville plage. Ce village se situe au milieu de la plage d’Utah Beach, qui avec celle d’Omaha Beach fait partie du secteur ou les américains ont débarqué. Les autres plages du Débarquement (Gold, Juno, Sword) étant en secteur anglo-canadien. Le convoi de WLA /WLC est précédé d’une quarantaine d’Harley civiles. Celles-ci ont pour mission d’ouvrir la route et de sécuriser les carrefours afin d’éviter toute insertion de véhicules civils dans le convoi. C’est la concession Harley-Davidson de Caen qui a encadré et assuré cette présence indispensable au bon déroulement du rassemblement.

En arrivant sur Ranoville

Cette première partie du parcours, à travers les routes de campagne, a permis de découvrir le bocage normand constitué de routes étroites bordées de haies épaisses entourant des champs de dimensions moyennes. On comprend au regard de ce paysage, les difficultés qu’on rencontré les soldats pour progresser à travers la campagne.

Le long d’Utah Beach

Après quelques kilomètres, les motards arrivent face à la mer. Utah Beach, longue plage de sable s’étend à droite et à gauche sur plusieurs kilomètres. La marée, à mi-chemin entre haute et basse, découvre une langue de sable qui s’étend sur 100 à 200 mètres entre la bordure côtière et la mer. C’est cette distance que les GI’s ont du parcourir sous le feu ennemi avant de faire taire, les mitrailleuses embusquées dans les bunkers.

Le convoi s’élance alors à droite, le long de la D421, en direction du musée d’Utah Beach qui se situe au sud-est de celle-ci. Au large, on devine les iles fortifiées de Saint Marcouf, aujourd’hui réserve naturelle. Après quelques kilomètres, à Saint-Martin de Varreville, les motos passent devant le monument du Débarquement de la 2ème Division Blindée Française. La division du Général Leclerc débarqua ici sur le sol français le 1er août 1944.

Sur la route côtière

Quelques minutes plus tard, la colonne arrive aux alentours du musée d’Utah Beach et des nombreuses stèles ou statues commémoratives des combats. Le public est important, de nombreux véhicules de touristes ou militaires d’époques stationnement aux alentours du musée et un bouchon se forme rapidement. La progression est ralentie, mais finalement, impressionné par le bruit de 121 Harley, le trafic s’estompe et le convoi reprend la route.

A l’approche du Musée d’Utah Beach

C’est un nouveau décor que les motards découvrent, celui des marais du Cotentin qui s’étendent de la côte à la ville de Carentan. Aujourd’hui, ce sont des champs qui semblent inoffensifs, encadrés par des fossés, plus ou moins larges, remplis d’eau et ou poussent les roseaux. Il faut s’imaginer, que dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, ces marais ont été inondés par les allemands. Le fond, vaseux, est immergé sous 1 à 2 mètres d’eau froide et stagnante. De nombreux parachutistes des 101e et 82e Airborne seront victimes de ce piège et se noient dans la nuit. Ces marais, ont contraint, les soldats débarqués à progresser vers l’arrière-pays le long des quelques voies carrossables disponibles et fortement défendues alors. La traversée des marais abouti au village de Sainte Marie du Mont qui fut au cœur des combats.

Arrivée au pied de l’église de Sainte Marie du Mont

Une halte bienvenue est organisée autour de l’église du village. Les visiteurs découvrent alors la variété de Harley militaires. Variété qui se retrouve dans les modèles présentés, WLA (version militaire américaine), WLC (version militaire canadienne) de différents types selon les années. Cette variété se retrouve aussi dans les marquages apposés sur les véhicules, les équipements des motos et les uniformes des pilotes. Du côté des WLA américaines (A pour Army), la Military Police (MP) est bien représentée, de simples GI’s sont aussi présents, enfin quelques motos sont aux couleurs de la 2eme DB française et en particulier de la DCR (Circulation Routière). Du côté des motos canadiennes, les pilotes ou équipages en uniforme et casque antichoc des Dispatch Riders font forte impression. Ces motards avaient, entre-autres, pour mission de livrer les ordres qui ne pouvaient être transmis par radio à différents points du front. Ils étaient experts en conduite tout-terrain et sous le feu ennemi.

WLC canadienne avec ses Dispatch Riders

Pour la dernière étape de la matinée, les motards s’élancent en direction de Carentan. Ils passent alors devant le carrefour de l’Homme Mort (Dead Man Corner). Cette maison, au carrefour des routes de Saint Côme et Sainte Marie du Mont, endroit stratégique, a été au cœur des combats. Elle fut successivement occupée par les allemands, puis les américains. Les Américains ont surnommé ce lieu le « Carrefour de l’homme mort » (Dead Man’s Corner), en souvenir du lieutenant Walter T. Anderson, tué à cet endroit le 7 juin 1944 et dont le cadavre resta visible plusieurs jours. Aujourd’hui, la maison est un musée : le D-Day Experience.

Devant le Dead Man Corner à Carentan
L’escorte civile… un comble pour des militaires !

Traversant la ville de Carentan, le convoi se dirige vers le village de Catz (prononcer KA en normand) pour la pause déjeuner. Ils sont accueillis au Normandy Victory Museum. Ce musée moderne, ouvert en 2017 est situé le long de la Nationale 13. En intérieur, plusieurs dizaines de scènes reconstituées permettent de découvrir la bataille des haies. En extérieur, il est possible de s’essayer au parcours du combattant, de faire un tour de char ou d’avion. Le musée est situé sur l’ancien A10 Airfield de la 9th Air Force US. Le 2 juin, de nombreuses autres animations étaient proposées avec des stands militaria ou encore la présence de blindés allemands rares présentés par le Musée des Blindés de Saumur.

Devant l’entrée du Normandy Victory Museum à Catz

Enfin, vers 15 heures, la colonne de motos s’est ébranlée pour traverser une nouvelle fois le bocage normand en direction du camp Géronimo à Saint Mère Eglise. Ce camp est la reconstitution d’un camp militaire américain d’époque. Le matériel présenté comme les véhicules Jeep, GMC, Dodge, blindés Sherman et bien sur motos Harley, ou encore les tentes sont d’époque. Les reconstitueurs qui animent le camp sont aussi en tenues militaires américaines de la 2nd Guerre Mondiale. Ils présentent ainsi au public un panorama complet et l’ambiance d’un campement d’époque en arrière du front.

Une fois les motos alignées pour la dernière fois, Gérard Lameloise convie les pilotes à le rejoindre sous la tente US 4 mats pour la remise des diplômes. Chacun reçoit alors ce document qui souligne sa participation au rallye commémoratif. A ce document est adjoint un superbe patch, déjà collector ! Il s’agit d’un patch orange et noir en hommage à la Quartermaster School de Harley-Davidson. Cette école, fondée par le constructeur en 1917 pendant la 1ere Guerre Mondiale, était en charge de former les militaires au pilotage et à la maintenance de leurs engins. L’école est réactivée, avec les mêmes missions de formation des militaires pendant la 2nd Guerre Mondiale.

Ce rassemblement a été un grand succès, aussi bien pour les pilotes que pour les spectateurs disséminés le long du parcours. Le temps clément a été de la partie pour le confort de tous. Ce convoi restera dans les mémoires pour ses participants qui sans nul doute seront volontaires pour une prochaine édition ! Rendez-vous en 2024 ?

Pierre-François Boselli
www.forties-factory.com

 

Gérard Lameloise, l’organisateur du rassemblement

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